Comment le rugby a conquis Courbevoie il y a… 130 ans

Le club de Courbevoie, un des plus importants de France, vient de publier un ouvrage retraçant sa longue histoire. Elle se confond avec l’arrivée de ce sport en France depuis l’Angleterre, via le chemin de fer qui vient de Normandie.

Par Olivier Bureau 

Le 31 décembre 2023 à 12h35

En 1898, c’est à Courbevoie, dont le club a été fondé cinq ans plus tôt, que le Stade Français a affronté Cooper’s Hill. DR.

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Le titre donne le ton : « Ovalie-sur-Seine ». Le RCC, pour Rugby Club Courbevoie, vient de publier un joli livre qui revient sur une histoire méconnue des profanes : 2023 qui s’achève a marqué 130 années de présence du rugby à Courbevoie. De quoi faire de la commune résidentielle des Hauts-de-Seine un des berceaux français du sport cher à Jean-Pierre Rives, dont le stade porte le nom.

L’idée de cet ouvrage, pour l’instant tiré à un millier d’exemplaires, est venue aux dirigeants pendant la crise sanitaire. « En 2020, on a eu envie d’abord de mettre en avant le travail d’Ivan Tessier, le photographe du club », se souvient Bertrand Nicol, le président du club. Le Breton de 50 ans, ancien deuxième puis troisième ligne centre, installé à Courbevoie depuis 2000, a pris les rênes du RCC en 2016.

, Bertrand Nicol, président du RCC avec le livre «Ovalie-sur- Seine». LP/Olivier Bureau

Il y avait le photographe, il fallait une plume. C’est Olivier Burel, un des dirigeants qui s’en est emparé. L’histoire l’a ramené à la toute fin du XIXe siècle : « En 1893, Courbevoie a accueilli la finale du Championnat de France entre le Stade Français et le Racing. Tout est parti de là ! Le club a évolué au fil du temps et a pris sa forme actuelle en 2004. » Le résultat a nécessité un véritable travail d’archiviste. Plus de 40 000 photos et documents iconographiques ont été visionnés.

 

Si le sud-ouest du pays fait aujourd’hui figure de terre promise, c’est bien par la Normandie et la banlieue ouest que le rugby a colonisé la France. « D’Angleterre, il est arrivé au Havre puis a pris la ligne menant à la gare Saint-Lazare. Courbevoie et Bécon sont dessus », poursuit Olivier Burel. Le ballon s’est arrêté à Courbevoie et n’en est plus reparti. Il a même fait école.

« Le sentiment d’appartenance est très fort »

Le rugby, aidé en cela par des équipes municipales et encadrantes décidées à ne pas laisser échapper le ballon ovale, s’est profondément enraciné à Courbevoie. « En 2021, nous étions même le club de France qui avait le plus d’adhérents avec 800 licenciés, insiste l’auteur d’Ovalie-sur-Seine. Dans le Sud-Ouest, chaque village a son club, pas en région parisienne où les clubs sont plus rares, ceci expliquant cela. Nous en sommes fiers et on s’enorgueillit aussi d’avoir toutes les catégories possibles, masculines comme féminines. »

Le stade aujourd’hui utilisé par le RCC a longtemps été un cynodrome. Ces courses de lévrier qui ont donné leur surnom aux joueurs et son identité visuelle au club. DR

Au fil de ces 130 années, le club a traversé voire provoqué des épisodes romanesques. Au début des années 1950, le rugby investit le stade jadis occupé par un cynodrome. Les courses de lévriers appartenant au passé, le greyhound donne désormais son identité visuelle au club. « On sait où on joue. C’est un lieu chargé d’histoire », assène Bertrand Nicol, un lévrier rouge brodé au revers de son blazer noir.

« Ce club m’a tellement apporté… Alors on voulait remettre cette histoire au goût du jour, la faire connaître. Ce lévrier transmet ce passé. Ici le sentiment d’appartenance est très fort », ajoute le colosse.

« Ce club fera toujours partie de la vie de mon fils »

Ces dernières années, les performances sportives ont ajouté à la dramaturgie. « Il y a quinze ans, nous étions en Promotion d’honneur, dans les tréfonds du rugby régional. Aujourd’hui, nous sommes en Fédérale 2, le top du rugby amateur », se réjouit Bertrand Nicol.

Le club s’est aussi féminisé. « Nous sommes six femmes parmi les dirigeantes et on a des joueuses de tous âges. Comme pour les hommes, il y a une fidélité totale. Mêmes quand on a quitté la ville, on revient au club », résume Sandrine Grassin, responsable des équipes seniors hommes et femmes. Des opérations comme des actions sociales, des sensibilisations au handicap ou un projet humanitaire au Sénégal, ont aussi contribué à en souder les membres.

Courbevoie (Hauts-de-Seine), samedi 9 décembre. Bertrand Nicol (en veste) présente le livre. A sa gauche, Olivier Burel, l’auteur et, avec le sweat à capuche gris, Jacques Kossowski, maire LR de Courbevoie. DR

Le RCC reprend à son compte l’idée, popularisée par le FC Barcelone, d’un club qui est plus qu’un club. Dans le club-house à l’esthétique très british, Laurence ne tarit pas d’éloge sur cette structure à laquelle son fils de 25 ans a adhéré voilà 18 ans. « Ici, c’est l’esprit collectif, pas compétition, qui domine, analyse-t-elle. Quel club aurait permis d’aller jouer au rugby en Nouvelle-Zélande ? Ils font plein de choses en plus du côté sportif. Ce club fera toujours partie de sa vie. Il le porte. »

« Ovalie-sur-Seine » est vendu 30 euros au club ou sur le site du RCC.